Portrait d’Eugène Delacroix, Nadar, Bibliotheque Nationale, Paris, France / Bridgeman Images

A côté du métro Saint-Paul (4e), l’église Saint-Paul-Saint-Louis abrite une toile de jeunesse d’Eugène Delacroix (1798-1863) achevée en 1827 : le Christ au jardin des oliviers. Face à trois anges éplorés, l’icône baisse la tête et lève le bras vers le ciel. A 600 mètres de là, rue de Turenne (3e), dans la chapelle de la église de Saint-Denys-Saint-Sacrement se trouve une autre toile : la Piéta, le Christ descendu de la croix.

Le Christ au Jardin des Oliviers, Eugène Delacroix (1798–1863), 1827, huile sur toile, 294 x 362 cm, église Saint-Paul-Saint-Louis

S’il a vécu dans le 9e arrondissement, Eugène Delacroix a décoré ces deux églises du Marais. Mais qui était vraiment ce représentant du romantisme du XIXe siècle ? Peintre français né à Charenton-Saint-Maurice, il ne saura pas que sa maison natale est aujourd’hui la médiathèque de cette ville du Val-de-Marne.

La Pietà, Eugène Delacroix (1798-1863), 1844

A sa naissance, son père, Charles Delacroix, ministre des Affaires étrangères, devient ambassadeur de Hollande. Nommé préfet de Marseille et de Bordeaux, il décède lorsque Eugène est âgé de six ans. Victoire, sa mère, est la fille d’un des plus grands ébénistes de son temps, Jean-François Oeben, au service du Louis XV. Petit dernier d’une fratrie de quatre, Eugène est élevé par sa mère. Les aînés étant déjà grands, il vit une enfance choyée avec elle rue de l’Université à Paris 7e. Brillant, il fait ses études au lycée Louis-le-Grand, mais perd sa mère, son pilier, en 1814.

Ses aînés Charles et Henriette le réconfortent. Grâce à l’appui de son oncle peintre Henri-François Riesener, il entre en 1815 dans l’atelier du peintre Pierre-Narcisse Guérin. C’est l’un des plus grands ateliers de l’époque. Cependant, l’artiste passe à côté du talent d’Eugène. C’est en 1822, qu’Eugène alors âgé de 24 ans, réalise une première grande toile inspirée de l’histoire littéraire Dante et Virgile aux Enfers (Musée du Louvre). Cette œuvre le fait immédiatement remarquer par la critique. Il incarne alors le mouvement romantique.

La Barque de Dante, Eugène Delacroix (1798-1863), 1822, Huile sur toile, 189 × 241,5 cm, Musée du Louvre
N’oublions pas que Delacroix est contemporain de Victor Hugo, d’Alexandre Dumas, d’Hector Berlioz, et d’Alfred de Musset. Comme il est un grand connaisseur de l’art des maîtres anciens et fréquente le Louvre ouvert en 1793, il admire les œuvres de Raphaël, de Michel-Ange, de Titien et de Poussin. S’en suivent d’autres expositions qui le propulsent au firmament de la scène artistique de l’époque.

En 1832, lors d’un voyage au Maroc, il y accompagne l’émissaire du roi Louis-Philippe, le compte de Mornay. La conquête de l’Algérie par la France deux ans auparavant a inquiété le sultan du Maroc. Il faut donc une ambassade in situ. Pour le jeune peintre, qui n’a guère bougé jusqu’alors, le voyage de Tanger à Meknès est un enchantement. Les objets rapportés de ce voyage lui inspireront soixante-deux toiles à son retour.

Une part importante de sa création est liée aux édifices religieux parisiens. Il reçoit des commandes, peint le décor de la bibliothèque du palais du Luxembourg (actuel Sénat). La première Exposition Universelle en 1855 lui offre une scène majeure. Trente de ses œuvres sont présentées et lui valent le titre de plus grand peintre de son temps.

Portrait de l’artiste, Eugène Delacroix, 1825 / 1850 (2e quart du XIXe siècle), Ecole de France
Jamais marié, ce grand discret tombe en secret amoureux d’une jeune anglaise, Elisabeth Salter, après le décès de sa mère. Il immortalise cet amour platonique par un portrait. Il y a eu ensuite Laure, qui a posé pour l’Odalisque au perroquet, et aussi Hélène. Et quelques autres, dont une métisse qu’il nomme « Aline la mulâtresse ». Les relations intimes sont habituelles dans l’enceinte des ateliers, pourvu qu’elles restent secrètes. Il entretient par la suite une liaison avec une jeune danseuse, Eugénie Dalton rencontrée dans son atelier. Eugène-Eugénie, quel destin ! A propos de son mari, elle lui écrit : « Je fais de mon mieux pour qu’il soit cocu le plus joliment du monde ». Eugène se détache d’Eugénie en 1830, las de leurs infidélités réciproques.

C’est à l’époque 1834 qu’il rencontre George Sand en pleine rupture avec Alfred de Musset. Sa souffrance se lit sur le portrait que Delacroix fait d’elle. Leur amitié perdure jusqu’à la mort du peintre. Mais on ne peut passer sous silence Elisa Boulanger, la Brigitte Bardot du moment, qui surgit dans sa vie. Femme à hommes, elle est surprise par la froideur de Delacroix qui a très bien compris comment ferrer ce genre de diva : il joue l’indifférence. Ensemble, ils voyagent en Belgique, en Hollande.

Portrait de George Sand, Eugene Delacroix, 1838, Private Collection / Bridgeman Images

Dans la peinture française du 19e, Eugène Delacroix est considéré comme étant le chef de file du romantisme. Baudelaire l’admire : « La nature n’est qu’un dictionnaire » auquel les peintres donnent une physionomie toute nouvelle. « Je n’aime pas la peinture raisonnable », écrit pour sa part Delacroix dans son journal. Il meurt prématurément chez lui, dans le 6e arrondissement, en 1863, en compagnie de sa femme de chambre.

Texte : Valérie Rodrigue

11.04.25

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